Histoire de la P4

Pour les Français, si la jeep est le véhicule symbole de la Libération de 1944, son remplacement est mis on question dès la fin des années 1940, C'est une volonté politique, celle de revoir une armée de nouveau équipée de matériels français Toutefois, pour un véhicule de liaison et de reconnaissance comme la jeep, l'affaire n'est pas aussi simple.

En effet, le grand nombre de véhicules en parc, soit plus do 10 000, est trop faible pour intéresser de grands constructeurs comme Renault ou Peugeot et trop élevé pour de petits constructeurs qui manquent de surface industrielle.

C'est ainsi qu'au cours des années 1950, plusieurs prototypes de jeep "à la française", dont la Delahaye VLR, verront le jour, mais sans réel lendemain.

D'autres tentatives au cours des années 1960 ne déboucheront pas plus.

Faute de solution au niveau national, la France va se rapprocher dans les années 1960 de l'Allemagne et de l'Italie en s'inscrivant dans un programme tripartite.

Le besoin pour les trois pays étant fixé à 50 000 véhicules, un véritable plan industriel peut être envisagé, Mais les différents besoins exprimés par les états-majors des trois pays, contradictoires ou redondants, les difficultés des impétrants aboutiront à une impasse industrielle et à une flambée des prix, du coup, le programme tripartite pour un 4x4 de liaison commun, baptisé "Europa Jeep", sera abandonné au début des années 1970.

En attendant l'armée française achètera 9 000 véhicules tout chemin Citroën Méhari pour prolonger la durée de vie des jeeps encore en parc, hors les missions de combat (voir à ce sujet BONIFACE Jean-Michel, Méhari contre Rodéo in Charge Utile n°106, octobre 2001, pp.19-25).
En 1974 a lieu une évaluation de véhicules civils existants (Land Rover, Toyota, Jeep, Fiat, VW). Un certain nombre de caractéristiques sont définies dont celles-ci :

  • transporter 4 personnes avec leur paquetage et un poste radio
  • aptitude à l'aérotransport et au parachutage

Face à l'échec des différentes tentatives pour remplacer la jeep, l'armée au début des années 1976 contacte les grands constructeurs automobiles nationaux Citroën et Peugeot.

C'est encore un échec car les industriels se refusent à financer l'installation d'une chaîne spécifique pour produire d'aussi faibles quantités.

Une autre solution s'offre aux militaires : un accord entre constructeurs français et étrangers.
Suite à cette demande,

Renault avec Fiat, réalise la francisation de la Nuova Campagnola avec moteur de R20 (Renault TRM500),

Moteur : 4 cylindres essence - 1995 cm3

Boîte : 4 vitesses

Puissance : 90 chevaux

Poids : 1670 kg

Capacité du réservoir : 80 litres

Vitesse de pointe : 120 km/h

Citroën monte le moteur de sa CX-Athena sur l'Iltis de Volkswagen (Citroën C44)

Moteur : 4 cylindres essence - 1818 cm3

Boîte : 4 vitesses

Puissance : 75 chevaux

Poids : 1400 kg

Capacité du réservoir : 80 litres

Vitesse de pointe : 130 km/h


et Peugeot installe le moteur de la 504 sur la Geländewagen de Mercedes (Peugeot P4).

En 1976, l'armée du Shah d'Iran commande à Mercedes-Benz un véhicule 4x4.

Le grand constructeur automobile allemand se retourne vers la société autrichienne Steyr-Daimler-Puch, spécialiste des véhicules tout terrain.

Mercedes et Steyr vont alors travailler ensemble sur un 4x4 d'abord désigné Explorer, et qui reprend pour l'organisation de son châssis la technique qui a fait le succès du Range Rover britannique.

Le véhicule qui est désigné classe G (pour Geländewagen}, voit sa production lancée en février 1979 dans l'usine de Steyr-Daimler-Puch à Graz en Autriche.

Mais comme entre temps, le Shah d'Iran a été détrôné et les commandes annulées, la classe G est dérivée en différentes versions civiles à châssis long ou court pour se poser en concurrente directe du célèbre Range Rover que l'on dit à l'agonie.

L'appel d'offre de l'armée française relance l'intérêt pour une version militaire, celle d'origine. Un accord entre Peugeot et Mercedes répartit la fabrication à 50/50 entre les deux constructeurs.

Peugeot installe sur la classe G, outre le moteur de sa 504, la boîte de vitesses de sa 604, des circuits électriques, réalise le soudage de la caisse et assure le traitement en cataphorèse.

Tout le reste est fourni par Mercedes qui n'accorde pas à Peugeot la possibilité d'exporter le véhicule désigné P4 autrement que vers les pays d'Afrique liés par un accord de défense avec la France.

Pas question non plus pour Peugeot de commercialiser la classe G même « francisée » sur le marché civil.

L'assemblage final des véhicules destinés à l'armée française ou à la coopération, s'effectue dans l'usine de Sochaux .

Le prototype du VLTT Peugeot-Mercedes roule en 1978 et commence une longue série d'essais y compris un rallye inattendu dans le Sud algérien avec deux P4, l'un à essence, l'autre Diesel.

Finalement, le Peugeot P4, de conception plus récent que ses deux concurrentes, basées sur des modèles vieillissants, sera choisi par l'armée française qui en commandera 15 000 exemplaires en 1981, commande ramenée à 13 500 suite à la déflation des effectifs de l'armée de terre.

En 1985, Peugeot qui se réorganise pour sa nouvelle génération de voitures civiles, bascule la production du P4 sur l'usine Panhard de Marolles en Hurepoix.

La société Panhard qui, depuis 1973, fait partie du groupe Peugeot et qui en est devenue la division Défense, reprend la construction du P4 au moment où la production de Sochaux a atteint les 7500 exemplaires dont une première tranche de 2 300 P4 à moteur essence.

En 1992, la société Panhard sera chargée de transformer les P4 essence en P4 Diesel pour 2 300 véhicules, les autres étant transformés par les ERM (établissements régionaux du matériel) outre les transformations, Panhard assemblera plus de 6 000 P4.